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C'EST NOTRE DIEU ! THIS IS OUR GOD !

Message 95

Le Credo au fil des Siècles

Parmi tous les symboles de la foi, deux tiennent une place toute particulière dans la vie de l’Église :

Le Symbole des apôtres - d'origine occidentale -, appelé ainsi parce qu’il est considéré à juste titre comme le résumé fidèle de la foi des apôtres. Le Symbole des apôtres est né vers le IIe siècle. À Rome, il a été enrichi et s'est répandu dans tout l'Occident. Il a été fixé sous sa forme actuelle vers le VIe siècle, et sa popularité doit beaucoup à Charlemagne.

Le Symbole dit de Nicée-Constantinople - d'origine orientale - tient sa grande autorité du fait qu’il est issu des deux premiers Conciles oecuméniques (325 et 381). Il demeure commun, aujourd’hui encore, à toutes les grandes Églises de l’Orient et de l’Occident.

L'Église d'Orient ne connaît en revanche que le symbole de Nicée-Constantinople, rédigé lors des conciles œcuméniques tenus en 325 et 381 dans ces villes, à partir d'un texte d'Eusèbe de Césarée, qui était probablement la profession de foi baptismale en usage dans l'Église de Jérusalem. L'élaboration de ce texte, qui est reconnu comme le symbole œcuménique de l'unité de l'Église dans la foi, eut d'emblée la perspective de l'unité des chrétiens. En effet, il s'agissait pour l'Église du IVe siècle, traversée par les controverses doctrinales, de contrer l'hérésie d'Arius. Le texte rédigé à Nicée et complété à Constantinople statue ainsi sur la nature pleinement divine et pleinement humaine du Christ, précisant que le Père et le Fils sont de même nature, et enfin que les trois personnes de la Trinité sont égales.

Malgré la prétention de ce texte à l'unité, les controverses et les divisions ont perduré dans l'Église, surtout en Orient. Les plus célèbres ont été les disputes autour des doctrines de Nestorius (Ve siècle), qui clamait la dualité des natures divine et humaine dans le Christ, puis celles autour du monophysisme (ne reconnaissant au contraire au Christ qu'une seule nature) lors du concile de Chalcédoine (451), ainsi que la dispute du Filioque, nuance théologique répandue à partir de l'Espagne au VIe siècle, et qui atteste que l'Esprit Saint "procède du Père et du Fils".

D’où viennent ces confessions de foi ? Interrogeons l’histoire.

1. Dans le Nouveau Testament

- La profession de foi de Pierre :

Souvenons-nous de la question de Jésus à ses disciples : « Qui dîtes vous que je suis ?»

Réponse de Pierre : « Tu es le Christ, le Fils du Dieu vivant » (Matthieu 16:15-16).

- Le kérygme, premier Credo :

Après la résurrection et la Pentecôte, ce même Pierre annonce aux foules le Christ Jésus, mort et ressuscité pour le salut du monde. (Actes 2:14-36) « Cet homme, livré selon le plan et la volonté de Dieu, vous l'avez fait mourir en le faisant clouer à la croix par la main des païens… Or, Dieu l'a ressuscité en mettant fin aux douleurs de la mort, car il n'était pas possible qu'elle le retienne en son pouvoir. Ce Jésus, Dieu l'a ressuscité ; nous tous, nous en sommes témoins. Élevé dans la gloire par la puissance de Dieu, il a reçu de son Père l'Esprit Saint qui était promis, et il l'a répandu sur nous : c'est cela que vous voyez et que vous entendez. » - Voir aussi : Actes 3:12-26 ; Actes 4:9-12 ; Actes 5:29-32.

Cette proclamation, c’est le kérygme, la « proclamation à voix haute », en grec : l'énoncé du coeur de la foi en 4 affirmations :

· Jésus que les chrétiens appellent Christ, Messie, a été mis à mort,

· Dieu l’a ressuscité,

· pour le pardon des péchés et le salut des hommes,

· nous en sommes témoins.

Dans les lettres de l'apôtre Paul, on retrouve aussi l’énoncé du Kérygme, par exemple dans 1 Corinthiens 15:1-8 : Proclamation de la foi au Christ, mort et ressuscité, mission d’aller évangéliser.

- L’affirmation de foi en un Dieu trinitaire :

Les apôtres reçoivent du Christ ressuscité la mission d’enseigner et de baptiser. L'évangile de Matthieu (écrit vers 80)) se termine par cette phrase :

« Allez donc ! De toutes les nations faites des disciples, baptisez-les au nom du Père, et du Fils, et du Saint-Esprit. » (Matthieu 28:19).

C’est la première affirmation trinitaire recensée, ce qui fait l’originalité, la spécificité de la foi chrétienne : un seul Dieu en trois « personnes ». Trois personnes distinctes qui n’en font qu’une.

On retrouve cette formulation de la Trinité, de ce Dieu Trine chez l'apôtre Paul :

1 Corinthiens 8:6 : « pour nous, en tout cas, il n'y a qu'un seul Dieu, le Père, de qui tout vient et vers qui nous allons ; et il n'y a qu'un seul Seigneur, Jésus Christ, par qui tout existe et par qui nous existons. »

2 Corinthiens 13:13 : « Que la grâce du Seigneur Jésus Christ, l'amour de Dieu et la communion de l'Esprit Saint soient avec vous tous. »

Tout semble simple, puisque dès le premier siècle, la formulation de la foi en ce Dieu Trine est énoncée clairement et distinctement par les apôtres.

Pourtant, il va falloir trois siècles pour que la formulation du dogme trinitaire soit précisée et définie, avec des débats d’idées parfois houleux et violents.

Beaucoup de questions se posent aux chrétiens des premiers siècles et des nombreuses doctrines et sectes apparaissent aux IIème et IIIème siècles : des hérésies, c'est-à-dire des choix différents, contraires à que dit l’Église :

- Les docétistes : le Christ a revêtu une apparence humaine, il ne s’est pas incarné.

- Les gnostiques : la création n’est pas l’oeuvre de Dieu, rejet de l’Ancien Testament, rejet de l’Incarnation du Christ.

- Les marcionistes : opposition d’un Dieu bon dans le Nouveau Testament et de celui de l’Ancien Testament.

- etc...

Ces hérésies conduisent l’Église et ses théologiens à prier, à réfléchir, pour préciser le contenu essentiel de la foi chrétienne. Ces penseurs, ces théologiens, on les appelle les Pères de l’Église, ceux qui vont définir la foi chrétienne. Car pour beaucoup de croyants, la foi en Dieu Trine, la nature du Christ - vrai Dieu et vrai homme - ne sont pas choses faciles à comprendre, c’est exigeant, comme ça l’est aussi pour nos contemporains, et pour nous.

- Résurrection ou bien réincarnation ? Dans l’antiquité, dans certaines religions orientales, en Egypte notamment, on croyait en la réincarnation après la mort. Quand est-il pour la foi chrétienne ? On ne conteste pas la résurrection. Il y a des témoins, les apôtres, qui ont vu Jésus mort et ressuscité. Croire en la résurrection fait des chrétiens des fidèles (Fides = Foi).

- Un Dieu méchant, sévère, celui de l’Ancien Testament, et un Dieu bon et miséricordieux, celui du Nouveau Testament ? Deux dieux ?

- Un Dieu ou trois dieux (le père, le fils et l’esprit), ou bien c’est le même en trois personnes ?

- Et Jésus ? Vraiment Dieu, vraiment homme, ou seulement Dieu, seulement homme ?

Les Pères de l'Église définissent, précisent, argumentent, afin de répondre aux questions qui se posent, afin de conduire les catéchumènes sur le chemin de la vérité et leur permettre ainsi de proclamer leur foi en Dieu Père, Fils et Esprit. Et en ces premiers temps de l’Église, ils sont de plus en plus nombreux, et ceci malgré les persécutions.

2. Le Symbole des apôtres : le Credo occidental

Les nouveaux baptisés affirment leur foi lors du baptême. Une forme dialoguée entre le prêtre célébrant et la personne baptisée où cette dernière répond "Oui je crois" aux différents énoncés de la foi.

On retrouve ces professions de foi baptismale dans différents recueils liturgiques et plusieurs Pères de l’Église l’évoquent, notamment Tertullien et St-Hippolyte de Rome.

Vers 217, Hippolyte, évêque de Rome, met par écrit les questions posées aux catéchumènes :

« Crois-tu en Dieu le Père toi-puissant ? Que celui qui est baptisé réponde : Je crois. »

« Crois-tu au Christ Jésus, le Fils de Dieu, qui est né par l’Esprit Saint de la Vierge Marie, est mort, a été enseveli, est ressuscité vivant des morts dès le 3ème jour, est monté aux cieux, est assis à la droite du Père, viendra juger les vivants et les morts ? Réponse : Je crois. »

« Crois-tu au Saint-Esprit, à la Sainte Église, et à la résurrection de la chair ? Réponse : Je crois. »

Chaque réponse est accompagnée d’une plongée dans l’eau : le baptême est administré en trois étapes.

On peut donc dire qu’à la fin du IIème siècle, l’Église de Rome possède un symbole baptismal où le dogme trinitaire est affirmé. C’est ce texte que nous appelons le « symbole des apôtres », lequel a été entièrement transcrit au IVème siècle en 340. C’est donc l’ancien symbole baptismal de l’Église de Rome. Le symbole des apôtres est appelé ainsi, parce qu’il est considéré à juste titre comme étant le résumé fidèle de la foi des apôtres.

Par la suite, le symbole des apôtres ne sera plus utilisé, il sera à nouveau employé après Vatican II. Il n'a été officiellement admis que dans l'édition 2002 du Missel romain. C’est celui que nous appelons aujourd’hui « le court ».

En effet, dès la fin du IVème siècle et jusqu’à Vatican II, on confessera la foi en utilisant le symbole de Nicée-Constantinople dit « le long ».

De quoi s’agit-il ?

3. Le symbole de Nicée-Constantinople (325-381)

Dès le premier siècle, le christianisme se diffuse dans l’empire romain, autour de la Méditerranée, dans les grandes métropoles – Byzance (Constantinople), Rome, Alexandrie, Antioche, ...

Malgré les persécutions, le nombre de chrétiens ne cesse de s’accroître. Un tournant dans l’histoire de l’Église fut la conversion de l’empereur Constantin au christianisme. Il accorde alors la liberté de culte aux chrétiens. Nous sommes en 313, c’est l’édit de Milan. Il n’y a plus de persécutions. Le danger vient alors de l’intérieur, de ces doctrines qui remettent en cause la foi reçue des apôtres, ce qui menacent l’unité du christianisme.

Parmi les fausses doctrines : l’hérésie arienne. À Alexandrie, le prêtre Arius (vers 318) développe un courant de pensée. Selon lui, Dieu ne peut pas engendrer, sinon il perdrait quelque chose de son être, de son essence. C’est un Dieu qui crée, qui n’engendre pas. Donc Jésus est une créature. Il a été créé et non pas engendré. Jésus est subordonné au Père. On ne peut pas adorer le Christ puisqu’il n’est pas Dieu.

Bref, une prédication qui a beaucoup de succès, une doctrine qui préserve l’intégrité de Dieu : Dieu ne peut pas se faire homme.

La question qui est au coeur, c’est La Question trinitaire :

- Comment Jésus Christ et l’Esprit saint sont-ils Dieu ?

- Comment Dieu peut-il être à la fois un et trois ?

- Comment Jésus est-il fils de Dieu ? Est-il fils adopté ou engendré ? S’il est adopté, il est donc inférieur au Père, de second rang.

Des débats houleux, la controverse s'envenime rapidement dans les églises orientales. C’est un grand danger pour l’unité de l’Église. L’empereur Constantin, récemment converti, se saisit de la question pour régler cette crise. Il faut définir la foi, et l’empereur réunit un concile oecuménique à Nicée en 325.

- Le Concile de Nicée :

Un concile oecuménique, universel, réunissant tous les évêques de l’« oecumène » : c'est le premier concile oecuménique (qui s’étend à toute la terre habitée et à l'ensemble du monde civilisé). 

Le concile se penche sur cette question de Dieu, Père, Fils et Esprit et donc sur la question de la filiation de Jésus. Il affirme que Jésus Christ est Dieu, de même nature que le Père « Engendré, non pas créé, de même nature que le Père » (Homooussios). Fils unique du Père, engendré par Lui, ayant donc la même substance, la même nature que le Père. Il lui est consubstantiel.

Le concile condamne la doctrine d'Arius et élabore une définition de la foi : le symbole de Nicée. Il commence en affirmant la foi au Dieu unique, créateur « Nous croyons en un Dieu, Père tout puissant, créateur de toutes choses visibles et invisibles … »

Pas deux dieux, celui de l’Ancien Testament, dur et injuste, et celui du Nouveau Testament, bon et plein d’amour, mais un seul Dieu créateur et tout puissant. Une toute puissance de l’amour qui se manifeste en Jésus.

« … et en un seul Seigneur Jésus-Christ, le Fils de Dieu, unique engendré du Père, c'est-à-dire de la substance du Père, Dieu de Dieu, lumière de lumière, vrai Dieu de vrai Dieu, engendré, non créé, consubstantiel (de même nature) au Père, par qui tout a été fait ...»

« … sans confusion, sans changement, sans division, sans séparation » entre les deux natures. C’est vraiment la proclamation de la foi Trinitaire.

Il ne suffit pas d’un concile pour tout régler et il y eut des réactions hostiles, surtout en Orient. Des évêques refusent d’adopter ce symbole et sont déposées et exilés avec Arius.

Pendant 50 ans, on discute, des querelles théologiques ont lieu dans les rues, aux thermes, chez les commerçants … (Cf. Grégoire de Nysse).

L’hérésie arienne ne disparaît pas, elle va se propager au-delà des frontières de l’empire romain, chez les peuples germaniques, ce qui aura des conséquences lors des invasions en Occident au Vème et VIème siècles.

Cependant, petit à petit, on adopte le symbole de Nicée, en Occident, à la suite de St-Hilaire de Poitiers. En Orient, c’est plus dur. St-Athanase se bat pour que les décisions de Nicée entrent dans les faits.

Mais la question se pose pour l’Esprit, un peu oublié à Nicée. On a affirmé que le Fils est de même nature que le Père, l’Esprit est-il de même nature que le Père et le Fils ? Certains soutiennent que l’Esprit n’est pas de nature, d’essence divine. Ce n’est qu’une créature (hérésie pneumatomaque ou macédonianiste).
Comment résoudre cette question ?

- Le concile de Constantinople (381) :

C’est l’empereur Théodose qui dénoue la crise en 381 en convoquant le Concile de Constantinople, 2ème concile oecuménique.

La foi de Nicée est réaffirmée solennellement et on affirme la divinité du Saint Esprit. Il
procède du Père et reçoit même adoration et même gloire.

« … Et en l'Esprit Saint, le Seigneur, qui vivifie, qui procède du Père, qui avec le Père et le Fils reçoit même adoration et même gloire, qui a parlé par les prophètes ... »

L’empereur Théodose confère aux décrets du concile de Constantinople force de loi.

On peut parler à présent du symbole de Nicée-Constantinople, issu des deux premiers conciles oecuméniques. C’est ce qui est commun et qui unit les Eglises d’Orient et d’Occident : « le symbole dit de Nicée-Constantinople tient sa grande autorité de ce qu’il est issu des deux premiers Conciles oecuméniques. Il demeure commun aujourd’hui à toutes les grandes Églises de l’Orient et de l’Occident ».

4. Éphèse et Chalcédoine (431 et 451)

D’autres conciles vont suivre au Vème siècle à Éphèse et Chalcédoine.

Jésus est-il vraiment Dieu ou simplement un homme ? Jésus, vrai Dieu et vrai homme ? Plus homme, plus Dieu ? Si Jésus est à la fois Dieu et Homme, alors comment Dieu peut-il être éternel et Jésus avoir une condition d’homme ?

C’est la question de la nature du Christ. Comment Dieu et l’homme sont-ils unis en Jésus Christ ? L’évêque de Constantinople Nestorius, en réfléchissant à la divinité et à l’humanité du Christ, arrive à la conclusion que Marie ne peut pas être la mère de Dieu, mais seulement celle de l’homme Jésus : Jésus est un homme, en étroite relation avec le Père, mais ce n’est pas Dieu qui s’incarne. Cela remet en cause la divinité de Jésus. En opposition, l’évêque d’Alexandrie, Cyrille, affirme que les deux natures du Christ, humaine et divine, sont unies sans confusion en Lui. Marie peut alors être nommée la mère de Dieu. C’est cette position qui est retenue au Concile d’Éphèse en 431, troisième concile oecuménique. Les deux natures, humaine et divine, du Christ sont unies. Mais sans se confondre, elles sont unies et distinctes.

Si Nestorius remettait en cause la divinité du Christ, une autre thèse, hérésie, remet en cause l’humanité de Jésus. Eutychès, un moine de Constantinople, affirme que la nature humaine de Jésus s’est fondue dans la nature divine. C’est le monophysisme, une seule nature divine et non plus deux natures unies.

Au 4ème concile oecuménique à Chalcédoine (banlieue de Constantinople) en 451, l’évêque de Rome, le pape Léon I, formule le dogme suivant : Il y a deux natures unies dans la personne du Christ, mais cette union ne supprime pas la différence. Il est vrai Homme et vrai Dieu.

Et jusqu’à aujourd’hui …

Ces quatre conciles oecuméniques sont considérés comme le fondement, la référence de la foi chrétienne. C’est donc ce symbole, tel que l’ont défini et écrit nos Pères dans la foi à Nicée-Constantinople et Éphèse-Chalcédoine que nous proclamons aujourd’hui.

Toutes ces questions nous emmènent bien loin !
Avant nous, d’autres se les sont posées, et aujourd’hui les enfants, les jeunes, les parents, les catéchistes se les posent, nous les posent. Cela nous invite à revenir aux sources de la foi transmise par les apôtres et à nous réapproprier le Credo.

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